Le Japon s'employait lundi à éviter une fusion potentiellement catastrophique à la centrale nucléaire de Fukushima à la suite d'une explosion d'hydrogène et de l'arrêt d'un circuit de refroidissement, trois jours après le séisme dévastateur dans le nord-est du pays
Fait crucial, les épais murs des caissons semblent intacts autour du coeur des réacteurs endommagés de cette centrale située à 240 km au nord de Tokyo, le long de la côte ravagée par le tsunami qui a suivi le séisme de vendredi dernier.
Les secouristes fouillent les décombres des zones dévastées par le tsunami, en quête de survivants, et s'efforcent d'apporter soins et réconfort aux millions d'habitants privés d'électricité ou d'eau courante, dans ce que le Premier ministre, Naoto Kan, a présenté comme la pire crise subie par le Japon depuis la Seconde Guerre mondiale.
Certains analystes estiment que les dégâts de la catastrophe sont si importants et le coût potentiel est si élevé - une évaluation l'a chiffré à plus de 170 milliards de dollars dans la seule zone directement touchée - que cela pourrait replonger le Japon dans la récession.
Dans deux villes côtières du Nord-Est, 2.000 corps ont d'ores et déjà retrouvés. Les autorités s'en tiennent pour l'heure à une évaluation d'au moins 10.000 morts. A Paris, on est sans nouvelles de 17 Français qui se trouvaient dans le Nord-Est japonais au moment du drame.
"C'est absolument cauchemardesque", a témoigné Patrick Fuller, un responsable de la Fédération internationale de la Croix-Rouge dans la ville d'Otsuchi, sur la côte. "La situation dépasse l'entendement. Presque tout a été réduit à l'état de ruines. Le gouvernement déclare que 9.500 personnes sont mortes, plus de la moitié de la population. Je crains vraiment le pire."
PROCÉDURE D'URGENCE
La plus grosse crainte pour l'heure est une fuite radioactive de grande ampleur à la centrale de Fukushima-Daiichi, où les ingénieurs s'affairent pour éviter une fusion du coeur de trois réacteurs.
Le coeur du réacteur n°3 est intact après une explosion survenue lundi, assure le gouvernement, qui a demandé cependant à tous les gens encore présents dans la zone d'évacuation de 20 km de rayon autour de la centrale de rester calfeutrés à l'intérieur des bâtiments.
Onze personnes ont été blessées dans l'explosion, selon Tokyo Electric Power (Tepco), l'opérateur de la centrale.
La compagnie a commencé à injecter de l'eau de mer dans le coeur d'un autre réacteur, le n°2, pour tenter de le refroidir, rapporte l'agence de presse Jiji. "C'est clairement une procédure d'extrême urgence", note Mark Hibbs, de l'ONG Carnegie pour la paix internationale.
Une fusion du coeur du réacteur ne peut être exclue, ajoute l'agence. Tepco a déclaré que les barres de combustible nucléaire avaient pu être complètement exposées à l'air libre. Selon l'opérateur, les barres sont désormais à moitié immergées.
Samedi, une explosion avait fait s'effondrer le hangar de confinement du réacteur n°1.
Le bilan officiel fait état pour l'instant de 22 personnes irradiées et jusqu'à 190 qui pourraient avoir été exposées à des radiations. La VIIe flotte américaine, qui participe aux efforts de secours, a décidé de s'éloigner temporairement par précaution de la côte nord-est en raison d'un faible niveau de radiation.
CONFUSION À TOKYO
La Corée du Sud, Hong Kong, Singapour et les Philippines ont déclaré qu'ils vérifieraient le niveau de radiation des importations de produits alimentaires japonais.
Dans le nord du pays, près de deux millions de foyers sont toujours sans électricité, et 1,4 million sont privés d'eau courante. On est sans nouvelles de plusieurs dizaines de milliers de personnes.
Plus de 450.000 personnes ont été évacuées des zones sinistrées par le tremblement de terre et le raz-de-marée, auxquels s'ajoutent 80.000 autres personnes évacuées de la zone de 20 km de rayon autour de la centrale de Fukushima-Daiichi.
Le séisme a contraint nombre de sociétés à suspendre leur production et les actions de certains grands groupes nippons ont chuté lundi, comme Toyota. Les indices à la Bourse de Tokyo ont clôturé en baisse de 7,5%, la plus forte chute depuis la crise financière de 2008.
Des coupures d'électricité tournantes sont appliquées dans le pays pour limiter la consommation, réduite du fait de l'arrêt de 11 centrales atomiques sur les 54 que compte le Japon.
Dans l'agglomération de Tokyo, où vivent 35 millions d'habitants, banlieusards et Tokyoïtes étaient plongés lundi dans la confusion et l'incertitude, les problèmes d'approvisionnement et de coupures d'électricité continuant.
Les rayons de certains magasins sont vides et de nombreuses lignes ferroviaires sont fermées, alors même que les gens reprenaient le travail après un week-end passé, pour beaucoup, devant les écrans de télévision et les images de désolation en provenance du nord-est du pays.
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