Comment diminuer le recours aux produits phytosanitaires sans compromettre les récoltes quand on sait que la Terre comptera 2 milliards d'habitants de plus en 2050 ? Quel est l'impact sanitaire réel de ces substances chimiques qui, d'un autre côté, permettent aux agriculteurs de produire à moindre coût une alimentation abondante et de qualité en luttant efficacement contre les parasites des cultures ? Enfin comment protéger «aussi bien l'utilisateur de produits phytopharmaceutiques que le consommateur des végétaux cultivés à l'aide de ceux-ci», interroge Claude Gatignol, député UMP de la Manche et Jean-Claude Étienne, sénateur UMP de la Marne dans le rapport «Pesticides et santé», remis mercredi à l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst) ?
Premier constat, l'agriculture est, contrairement à une idée très répandue, de plus en plus économe en pesticides. En dix ans, le tonnage de matières actives (fongicides, herbicides, insecticides) consommées en France a chuté d'un tiers, passant de 120 000 tonnes en 1999 à un peu moins de 80 000 tonnes en 2008. Le tout essentiellement grâce à la pratique de l'agriculture raisonnée et à l'utilisation d'outils d'aide à la décision de plus en plus sophistiqués.
Études épidémiologiques
Malgré ces résultats appréciables, MM. Étienne et Gatignol soulignent que «des progrès doivent encore être faits». La présence de résidus de pesticides dans les sols, l'air, l'eau et l'alimentation, quoiqu'à très faible dose, incite à la vigilance. D'autant que l'on connaît encore mal les effets à long terme de ces bas niveaux de contamination sur la santé des agriculteurs et, plus encore, des consommateurs. La difficulté de mener à bien une telle évaluation «tient à la multiplicité des facteurs pouvant induire des symptômes identiques», notent les deux parlementaires. Des études épidémiologiques menées aux États-Unis montrent toutefois que les agriculteurs, qui sont les principaux utilisateurs de pesticides, ont globalement moins de cancers que la population générale. En revanche, ils développent plus fréquemment certains types de cancers (cerveau, prostate, leucémies, lèvres) ainsi que d'autres pathologies comme les maladies respiratoires, les troubles de la reproduct ion ou neurologiques (Parkinson, Alzheimer). Plus surprenant «le dosage des pesticides dans l'urine des applicateurs démontre contre toute attente que l'exposition aux pesticides ne dépend pas de la quantité de pesticides utilisée ou de la surface traitée mais de la méthode d'application et du niveau de protection de l'applicateur», notent MM. Étienne et Gatignol qui recommandent logiquement «d'inciter les agriculteurs à employer» les équipements de protection adéquats (gants, masques…).
Réduire plus encore le recours aux pesticides est sans conteste le plus sûr moyen de limiter les risques d'exposition. Mais, à l'agriculture biologique, qui utilise elle aussi des produits dangereux pour la santé (comme la roténone) ou l'environnement (comme le sulfate de cuivre) et qui n'est pas en mesure de répondre aux défis alimentaires du futur, les deux parlementaires préfèrent l'agriculture raisonnée, plus économe en engrais et en pesticides que l'agriculture conventionnelle. Ils recommandent également de «favoriser les recherches en biotechnologies végétales permettant de créer des variétés de plantes résistantes aux ravageurs de cultures». Autrement dit, les OGM que la France et l'Europe s'évertuent à clouer au pilori depuis dix ans.
Le Figaro
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