vendredi 9 avril 2010
Quel avenir pour l'industrie éolienne française ?
D'après une récente étude du cabinet Capgemini, les industriels français présentent toutes les conditions nécessaires à l'émergence d'une industrie nationale de l'éolien compétitive. À condition, pour les professionnels du secteur, d'établir un cadre réglementaire cohérent avec les objectifs.
Les industriels français ont les capacités de conception et de construction de l'ensemble des composants d'une éolienne. » Les conclusions de l'étude menée par le cabinet Capgemini Consulting, parue le 31 mars dernier, sont prometteuses. Initiée par le Syndicat des Énergies Renouvelables (SER) et l'Ademe, cette évaluation du tissu industriel visait à déterminer le potentiel des entreprises de l'industrie lourde à élargir rapidement leurs activités dans le secteur de l'énergie éolienne. Or, sur les 400 entreprises sollicitées, 150 se sont montrées intéressées et équipées pour concevoir un ou plusieurs des onze composants principaux d'une éolienne. Autrement dit, les industriels français, forts de leurs compétences historiques dans la métallurgie, la chaudronnerie, l'aérodynamique, etc., présentent tous les atouts nécessaires pour se positionner à la fois sur un marché national émergent, mais également sur un marché international dominé par les Européens (sept des dix turbiniers leaders mondiaux sont européens).
Car l'éolien a le vent en poupe. Depuis dix ans, la croissance mondiale avoisine les 25% annuels, et cette énergie a été la plus développée en Europe en 2009. Mais la France, qui présente le deuxième potentiel éolien européen, du fait de ses nombreuses façades maritimes, reste pourtant à la traine, au septième rang en termes de capacité cumulée (avec 4,5GW), très loin derrière l'Allemagne (25,8GW). Pour les professionnels du secteur, il est donc grand temps de prendre le train en marche. D'autant plus que les objectifs du Grenelle de l'Environnement visent une capacité installée de 25 GW en 2020, pour des investissements annuels moyens de 3 milliards d'euros. Et si l'Ademe dénombre aujourd'hui 10 000 emplois directs ou indirects répartis dans 140 entreprises du secteur, le SER estime que 60 000 emplois pourraient être dédiés à l'éolien d'ici 2020.D'après Michèle Pappalardo, en charge du Commissariat général au Développement Durable, « l'Allemagne et l'Espagne, leaders européens comptent respectivement 90 000 et 40 000 emplois dans l'éolien. De toute évidence, nous avons un intérêt économique et social direct à développer cette industrie en France. » Jean-Louis Bal, directeur des productions et énergies renouvelables de l'Ademe, partage cet avis, et ajoute qu'« avec le développement de l'éolien offshore et de l'éolien flottant, de belles perspectives s'ouvrent à nous. »
Un cadre réglementaire qui fait débat
Mais pour Nicolas Wolff, président de France Énergie Éolienne et membre du SER, une incertitude de taille plane sur l'avenir de la filière : « l'industrie se développera seulement avec cadre réglementaire propice. Or, les recommandations du rapport Ollier vont totalement à cette encontre. Avec une telle réglementation, nous ne pourront pas atteindre les objectifs du Grenelle. » Ce fameux rapport inquiète effectivement les professionnels de l'éolien et crée de nombreux remous dans les couloirs du Parlement. Outil de référence sur le secteur pour l'élaboration du Grenelle II, il préconise un durcissement de la législation pour éviter tout effet d'aubaine. Or, les tarifs de rachat français de l'électricité d'origine éolienne sont les plus bas d'Europe. Pour Nicolas Wolff, cet effet d'aubaine est donc illusoire. Et comme le souligne Jean-Louis Bal, « à ma connaissance, il n'y a pas aujourd'hui de développement anarchique de l'éolien en France. Car la réglementation impose déjà des études d'impact, la concertation des riverains, et la délivrance d'un permis de construire. D'ailleurs, les zones de développement éolien ont justement été créées pour éviter un développement anarchique. » Autre point d'achoppement entre le régulateur et les industriels, la taille minimale des parcs éoliens pourrait être fixée à 15MW. Une mesure qui rend André Antolini, président du SER, des plus perplexes. « Il y a cinq ans, on nous imposait de faire des parcs de moins de 12 MW. Aujourd'hui, on fixe un seuil minimal de 15 MW. Comment voulez-vous que les industriels y voient clair, ne serait-ce qu'à court terme ? D'autant qu'il existe de nombreux paysages où l'on pourrait intégrer un petit nombre d'éoliennes. » Enfin, l'éventuel classement des éoliennes en ICPE*, qui supposerait l'obtention d'un permis spécifique supplémentaire, fait aussi grincer des dents. Pour le SER, « tout cela semble plutôt destiné à empêcher le développement de la filière. »
Jugeant le rapport « foncièrement anti-éolien et parfois inquisiteur », le député socialiste Philippe Plisson avait d'ailleurs démissionné de sa fonction de co-rapporteur, avant que le texte ne soit définitivement validé par la Commission des affaires économiques dirigée par le député UMP Patrick Ollier. Reste à savoir si les parlementaires inscriront ces recommandations dans le texte de loi du Grenelle II, dont le vote est attendu pour le mois de mai.
Source - Novethic.fr
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