Nadine Brisson, chercheur de l'Inra (Institut national de recherche agronomique) en Provence Alpes Côte d'Azur, en est déjà convaincue : la sécheresse de 2011 s'annonce plus grave qu'en 1976. Les pluies orageuses qui traversent la France depuis le début du week-end devraient bénéficier aux cultures d'été mais arrivent trop tard pour les céréales d'hiver. Cette situation, qui affecte durement les éleveurs, devrait entraîner une diminution significative des rendements agricoles, en particulier pour le blé et le fourrage. La période comprise entre mars et mai apparaît aujourd'hui comme la plus sèche depuis 50 ans, selon Météo France ; l'Inra s'attend à une baisse des rendements de 10% à 30% selon les régions, pour l'ensemble de l'Union européenne.
Tout le territoire français est touché. En Lozère certains agriculteurs risquent de perdre "80 à 90% de la récolte de fourrage", a averti Franck Bouniol, coprésident des Jeunes Agriculteurs. Aussi les éleveurs, "pour arriver à garder leurs bêtes jusqu'à avril 2012, vont devoir acheter entre huit et neuf mois de stock de fourrage, sinon on les abat ou on dépose le bilan", selon lui. Dans les autres régions frappées par la sécheresse, le scénario est identique : entre 50 et 80% de pertes des récoltes de fourrage en Rhône-Alpes, jusqu'à 70% en Auvergne, un tiers des récoltes en Dordogne, selon les responsables agricoles locaux.
Comment remplacer le fourrage ?
Pour obtenir de la paille afin de remplacer le fourrage qui fait défaut, les appels à la solidarité commencent à être entendus. "La première solidarité, c'est de ne pas broyer la paille que les céréaliers utilisent en temps normal comme engrais", a rappelé Franck Sander, président des Jeunes Agriculteurs du Bas-Rhin. "Une bourse à la paille" a été ainsi créée par les syndicats agricoles du Tarn. "Certains céréaliers sont même prêts à donner leur paille gratuitement", selon Cédric Carcenac, président des Jeunes Agriculteurs. Les syndicats d'agriculteurs du Pas-de-Calais, "région plus habituée à l'excès d'eau qu'à la pénurie", selon Christophe Polin de la Fédération départementale des Syndicats d'Exploitants agricoles, "ont établi des listings pour mettre éleveurs et céréaliers locaux en relation (...) et répondre aux demandes des autres départements".
Dans l'Aisne on nourrit les bêtes avec de la "pulpe sur-pressée" de betteraves ou des cossettes de pois livrées à des prix symboliques aux éleveurs. En Camargue, les riziculteurs devraient entrer dans la chaîne de solidarité cet automne en fournissant leur paille de riz, "normalement broyée et qui ne sert à rien", selon André Boulard, président de la Chambre d'agriculture des Bouches-du-Rhône. Cela servira de litière et permettra de réserver le foin à l'alimentation.
Malgré ces efforts, la file d'attente des bovins à l'abattoir de Thiviers en Dordogne s'allonge, la demande d'abattage ayant été multiplié par deux. L'établissement a lancé un appel à la raison des éleveurs. Le même appel a été adressé aux céréaliers pour éviter la spéculation et maintenir le prix de la paille dans des limites acceptables, "entre 25 et 35 euros la tonne", selon Cédric Carcenac. Cela correspond au coût de la matière organique à répandre dans les champs à la place de la paille broyée. Sous l'égide du ministère des Transports, une cellule interministérielle de crise, associant l'armée, pour assurer éventuellement des livraisons de grandes quantités de paille a été mise en place vendredi. Les premiers transports de paille devraient commencer autour du 20 juin, date correspondant au début des moissons avancée de 3 semaines en raison du stade de maturité des céréales. Selon la ministre de l'Ecologie et des Transports, le dispositif devrait rester en place une bonne partie de l'été.http://lci.tf1.fr/economie/conjoncture/degats-de-la-secheresse-premier-bilan-6517831.html
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