Au pied de la criée de Port-la-Nouvelle, comme dans les autres ports de Méditerranée, les chalutiers sont à quai pour un mois, victimes d'une diminution de la taille du poisson et de la hausse du prix du gazole.
"Pour un pêcheur, c'est dur de faire rester le bateau à quai, c'est la pire chose qui puisse arriver", se désole le président du syndicat des chalutiers du port, Bernard Pérez, devant les neuf navires amarrés.
Les chalutiers de Sète (Hérault), du Grau-du-Roi (Gard), de Port-Vendres (Pyrénées-Orientales) et de Marseille respectent eux aussi un arrêt de pêche de 35 jours, une mesure prise pour la deuxième année consécutive. Ils sont indemnisés par l'Etat sur la base des revenus des années précédentes.
Cette décision, acceptée par tous les métiers de la mer, répond à une réalité simple : ces gros navires de plus de 20 m ne sont plus rentables en Méditerranée. "On était dans une période très difficile, chaque armement sortait à perte", reconnaît M. Pérez.
Pourtant, la ressource traditionnelle de ces chalutiers, le "poisson bleu" (sardine et anchois), est toujours là. "Les poissons sont disponibles en nombre, avec une tendance à une hausse de la population, notamment pour les anchois", selon le dernier rapport PelMed (Pélagiques Méditerranée) de l'Ifremer.
Mais pour une raison indéterminée (qualité de la nourriture et des conditions environnementales...), on observe une forte mortalité après l'âge d'un an, constate David Roos, scientifique de l'Ifremer à Sète.
Sardines et anchois sont donc présents en grand nombre, mais de petite taille et "il y a une forte diminution de la quantité de poissons adultes capturable par la pêcherie", un phénomène observé depuis 2008, remarque-t-il.
"A Port-la-Nouvelle, le tonnage des poissons bleus est passé de 2.600 à 400 tonnes entre 2008 à 2011, et à Port-Vendres, de 1.200 à 700", précise Stéphane Péron, délégué à la Direction départementale des territoires et de la mer (DDTM) pour les Pyrénées-Orientales et l'Aude.
Les "petits métiers", pêcheurs avec des bateaux de petit tonnage, s'en sortent encore. Mais les chalutiers, gros consommateurs de gazole, ont du mal à survivre. "Pour 1.800 euros de recette par jour, on dépense 1.400 à 1.500 euros en gazole" et il faut encore payer l'équipage et les frais annexes, précise Bernard Pérez, armateur de l'Edouard-François.
"On aurait un gazole à un prix raisonnable de 0,40 centime, au lieu de 0,75 actuellement, les bateaux seraient rentables, on pourrait donner un salaire décent à l'équipage", estime-t-il.
Les pêcheurs de "bleu" ont bien tenté de pallier le manque à gagner en se tournant vers le poisson "blanc", comme le merlu, mais celui-ci est en diminution, victime de la surpêche.
Aujourd'hui, les chalutiers de la côte méditerranéenne française se trouvent donc dans une impasse et beaucoup pensent à cesser leur activité, avec destruction de leur bateau grâce au plan de "sortie de flotte" mis en place par le gouvernement et l'Europe.
"Le 1er juillet, on saura si le bateau est accepté à la casse ou si on reprend la mer...", lance désabusé le patron du Florence-Adeline, Denis Raynaud. "Ils ne veulent plus de nous en Méditerranée", lâche-t-il, désabusé.
"Ma crainte, souligne Bernard Pérez, c'est que tous les chalutiers de Port-la-Nouvelle s'arrêtent", avec la perte de 50 à 60 emplois directs, mais aussi de 200 indirects (criée, mareyeurs, poissonniers...). Déjà, la criée n'est ouverte que trois jours par semaine au lieu de cinq.
Et l'été dernier, le club de rugby de la commune voisine de Sigean a dû innover pour sa traditionnelle "sardinade" : "On a pris des sardines d'Italie, reconnaît le secrétaire du club, Marc Guiboux, celles d'ici étaient trop petites".
http://www.20minutes.fr/article/925603/mediterranee-malade-poissons-chalutiers-restent-quai
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