jeudi 10 mai 2012

L'angoisse à Fessenheim, où la centrale nucléaire est condamnée

Fessenheim 2012: candidate à la poursuite de la centrale nucléaire". Après l'élection à la présidence française de François Hollande, la banderole est encore tirée entre l'église et la mairie, dans ce bourg qui vit au rythme de sa centrale depuis 35 ans.
La fermeture promise par le nouveau président de la République française suscite l'inquiétude des habitants de ce village de 2.300 âmes, qui ont voté dimanche à près de 69% pour son rival Nicolas Sarkozy.
Le socialiste, qui veut réduire la dépendance de la France au nucléaire en faisant passer de 75% à 50% la part de l'atome dans la production d'électricité, a annoncé pendant sa campagne la fermeture d'une seule centrale, la plus ancienne: Fessenheim.
"Tous ceux qui ont joué Hollande, dehors", lance un vieil homme en entrant dans un restaurant. Affairé, le propriétaire n'est pas d'humeur à s'épancher: il vient de reprendre cet hôtel-restaurant et ne veut pas faire attendre les clients.
Aurait-il racheté l'endroit s'il avait su que la centrale, située à quelque 2 km de là, était vouée à la fermeture? "J'aurais réfléchi", lâche-t-il, le regard sombre, expliquant que la plupart des clients de l'hôtel sont liés aux installations d'Electricité de France (EDF).
"Tout va fermer ici, bravo les Parisiens", lance Norbert, plus volubile. Ce maraîcher de la région vient vendre ses fruits et légumes à Fessenheim "depuis 1982". "L'argent ici vient de la centrale. Si elle ferme, c'est fini", poursuit-il, en rechargeant ses cageots.
Dans le supermarché installé à l'entrée de Fessenheim, le directeur Dominique Schelcher, 41 ans, fait part de ses "incertitudes" pour l'avenir du magasin créé par son père, qui emploie 90 personnes.
Simple supérette dans les années 1970, le commerce s'est agrandi progressivement. "J'ai décidé l'an dernier d'investir 3 millions d'euros, quand l'Autorité de sûreté nucléaire a dit que la centrale pourrait continuer encore 10 ans", explique-t-il.
"On ne désespère pas qu'il change d'avis"
"Maintenant, il faut qu'on nous donne de la visibilité sur l'avenir et des garanties sur l'emploi local. Pour l'instant, je vais geler les embauches", poursuit-il.
A Fessenheim, rares sont les foyers dont aucun membre ou proche ne travaille à la centrale, qui emploie plus de 700 personnes et quelque 200 prestataires permanents.
"Quand je me suis installée en 1974, le village comptait 700 habitants. Des écoles ont été créées depuis, des maisons ont été construites pour les agents EDF", souligne Marie-Claude Meyer, retraitée de 66 ans, ancienne employée de la centrale. "Là, c'est sûr, les gens s'inquiètent", poursuit-elle.
François Hollande a affirmé durant sa campagne que la fermeture de la centrale ne serait "sans doute" achevée qu'en 2017. L'installation, doyenne du parc nucléaire français, aura alors quarante ans. "Tout le personnel sera reclassé et Fessenheim deviendra un site pilote pour le démantèlement des centrales en fin de vie", a-t-il assuré.
La promesse sur l'emploi est "démagogique" selon Jean-Luc Cardoso, technicien d'exploitation à la centrale et délégué syndical CGT. Il a "le coeur à gauche" mais admet avoir eu "un pincement au coeur" quand François Hollande a été élu, "vu ses positions sur le nucléaire".
"Mais on ne désespère pas qu'il change d'avis, sa position a déjà beaucoup évolué", poursuit-il, assurant que les habitants étaient convaincu de la sûreté de la centrale, construite dans une zone sismique.
Pourtant, "certaines personnes ne sont pas si rassurées que ça dans le village, mais elles n'osent pas le dire", assure André Hatz, de l'association antinucléaire Stop-Fessenheim.

http://www.20minutes.fr/article/930383/angoisse-fessenheim-ou-centrale-nucleaire-condamnee

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